Selon quel type d'homme?
![Air Baltic Blondes / Lars Magne Sunnan via FlickrCC Licence by Air Baltic Blondes / Lars Magne Sunnan via FlickrCC Licence by](http://www.slate.fr/sites/default/files/imagecache/node-story/edit_article.jpg)
Car tous les hommes, paraît-il, ne sont pas égaux quand il s'agit de se focaliser sur de tels points faibles féminins.
Avec ses collègues, il demanda donc à 72 hommes hétéro d'évaluer les mêmes images que précédemment, et de la même façon. Mais cette fois-ci, les chercheurs mesurèrent aussi chez ces participants des traits de personnalité essentiels, ainsi que leur propension à désirer et pratiquer le sexe sans engagement.
Par exemple, les étudiants durent répondre à ce genre de question: «Avec combien de partenaires avez-vous eu des relations sexuelles sans vouloir a priori vous engager dans une relation à long-terme?» et «Combien de fois vous arrive-t-il de ressentir une attirance sexuelle pour des personnes avec qui vous n'entretenez aucune relation amoureuse?»
Selon la principale conclusion de cette seconde étude, plus les hommes avaient un esprit licencieux ET manifestaient de lacunes en termes d'empathie et de chaleur humaine, plus ils avaient tendance à détecter les indices d'«exploitabilité» féminine et à y réagir.
Les hommes dénués de cette combinaison fondamentale –par exemple, un homme désagréable préférant la monogamie, ou un homme charmant adorant manger à tous les râteliers– avaient davantage de chances de voir ces indices leur passer au-dessus de la tête et rater ainsi l'occasion de profiter d'une «fille facile».
Ainsi, loin de voir l'hypothèse de l'exploitabilité sexuelle s'emparer du cerveau masculin et d'en faire un gros tas de stéréotypes indifférenciés, il s'agit de bien comprendre que les stratégies reproductives masculines se répartissent en diverses sous-catégories. Pour résumer, tous les hommes ne sont pas des têtes de nœud.
Un algorithme social
On peut facilement voir de la misogynie dans l'hypothèse de l'exploitabilité sexuelle, mais je ne crois pas que les auteurs soutiennent une idéologie aussi macho. Allez vous plaindre à la sélection naturelle, pas aux théoriciens qui tentent de l'élucider avec les moyens du bord.
Les auteurs essayent – de façon admirable, à mon sens– de décrypter un algorithme social implicite dans l'espoir de mieux comprendre les relations entre les sexes.
Cela étant dit, ces études sont pour le moment loin d'être parfaites. La critique la plus évidente serait d'avancer que les femmes ancestrales n'avaient pas de mojitos, ni de martinis, pour desserrer leur fragile emprise sur leur chasteté, et que des perceptions bourrées d'éthanol n'ont pas pu subir une quelconque pression sélective.
Mais connaissant les psychologues évolutionnaires, leur premier contre-argument sera de vous dire que l'ivresse des femmes modernes n'est qu'une version exagérée des états de conscience modifiée que les humains expérimentent depuis des centaines de milliers d'années. Mais, en ce qui nous concerne, les soucis d'ordre méthodologique sont les plus remarquables.
Par exemple, vu que les photos ont été collectées en ligne, des confusions sont inévitables. Des images de jeunes femmes éméchées et postées sur Internet ne représentent-elles pas tout simplement des femmes physiquement plus séduisantes –disons, des filles qui se sont pomponnées avant de sortir– comparées aux strictes photos d'identité de celles qui se mettent moins la tête à l'envers?
On peut difficilement penser que cela puisse s'appliquer à tous les critères d'«exploitabilité» (comme la «léthargie»), mais des problèmes comparables pourraient certainement concerner les «vêtements moulants» et l'«air aguicheur».
Pour corroborer ces critères à d'autres éléments comme la symétrie faciale, par exemple, il aurait été préférable, à mon sens, d'utiliser un modèle unique présentant un échantillonnage ciblé des 88 indices choisis par les premiers évaluateurs.
Limites esthétiques
J'ai aussi l'impression que, même si les hommes abaissent leurs critères lorsqu'il s'agit d'évaluer des femmes pour un coup d'un soir, même le plus surexcité, le plus cruel et le plus monstrueux des hommes a ses limites esthétiques. Ce qui pourrait expliquer pourquoi les signes purement physiques d'«exploitabilité» proposés –le fait, par exemple, d'être naine ou obèse– n'ont pas fonctionné dans la première étude.
En adoptant une interprétation stricte du modèle des chercheurs, après tout, même une femme souffrant de profonds handicaps mentaux (une femme dans le coma branchée à un respirateur artificiel, par exemple, ou une autre possédant le QI d'un opossum malade) aurait dû être considérée comme sacrément bandante. Mais cela sonne tout simplement faux.
Je vais prendre un gros risque, mais conformément à leur perspective évolutionnaire théorique, peut-être qu'un degré minimal de normalité génétique ou de compétence maternelle, même chez des femmes «faciles», fait toute la différence.
Selon leur modèle, si on considère que le but inconscient pour ces hommes est de répandre leurs gènes sans avoir à se soucier de responsabilités paternelles, même la plus invalide des femmes devrait avoir, au minimum du minimum, suffisamment de cellules nerveuses en état de marche pour élever un enfant en bonne santé jusqu'à sa maturité.
Prévisible ou pas?
D'après moi, on peut légitimement considérer les conclusions de ces études comme cohérentes avec l'hypothèse de l'exploitabilité sexuelle soulevée par les auteurs –et, plus généralement, avec les différences sexuelles en termes de stratégies reproductives sélectionnées au cours de l'évolution.
Mais ici, nous retombons sur l'une des critiques les plus constantes de la psychologie évolutionnaire, estimant que cette discipline ne fait que proposer des «histoires à dormir debout» ou des «justifications ad hoc» pour expliquer l'ensemble de ses données.
Les effets rapportés par Goetz et son équipe peuvent, peut-être, être tout aussi bien interprétés en fonction de perspectives non-évolutives. (Si c'est votre avis, je serais curieux de lire vos suggestions en commentaire).
Et qu'importe votre manière de les interpréter, de tels résultats peuvent aussi sembler axiomatiques, vu que les hommes trouveront «évidemment» que les femmes éméchées ou avec du vent à la place de la cervelle sont plus faciles à baiser.
Mais nous devons aussi faire attention à nos propres préjugés rétrospectifs: après tout, je ne suis pas certain que la plupart des gens auraient pu prédire que ces hommes allaient, aussi, trouver de telles femmes plus séduisantes.
Toutes choses égales par ailleurs, auriez-vous réellement pensé que ces femmes allaient, aux yeux de l'homme moyen, paraître physiquement plus attirantes que leurs congénères sobres et spirituelles?
Jesse Bering
Traduit par Peggy Sastre
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